Preuve des heures supplémentaires : la cour de cassation enfonce le clou

La preuve des heures supplémentaires connaît un régime légal spécifique de preuve partagée en vertu duquel le juge ne peut pas simplement rejeter la prétention du salarié s’il n’a pas été en mesure de prouver sa position. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un récent arrêt (Cass. soc. 29 mars 2023, n°21-25.314).

En l’espèce, un salarié avait saisi la juridiction prud’hommale quelques mois après son licenciement pour obtenir le paiement de ses heures supplémentaires et du repos compensateur. Au soutien de sa demande, le salarié produisait un tableau détaillant semaine par semaine les heures supplémentaires qu’il prétendait avoir effectuées, ainsi que d‘autres tableaux de décompte des horaires de travail.

La Cour d’appel de Poitiers avait débouté le salarié au motif qu’il ne fournissait pas d’éléments suffisamment fiables pour étayer ses prétentions, et exiger que l’employeur établisse le temps de travail effectif par renversement de la charge de la preuve.

Le salarié a formé un pourvoi en cassation.  

La Cour de cassation casse et annule la décision des juges du fond, et affirme que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre, et ce, sur le fondement des articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du Code du travail, desquels il résulte qu’il appartient au salarié de présenter des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La Cour de cassation rappelle ici le revirement de jurisprudence opéré en 2020.

Pour rappel, avant ce revirement, le système légal de preuve partagée s’enclenchait à condition que le salarié fournisse des éléments de nature à étayer sa demande de paiement d’heures de travail effectuées, préalablement à la confrontation des preuves par les parties. A défaut, sa demande était directement rejetée (Cass. Soc 25 février 2004 n° 01.45-441). Depuis 2020, le salarié n’a plus à étayer sa demande au préalable pour activer le système légal de preuve partagée, mais doit seulement présenter des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre utilement (Cass. Soc. 29 janv. 2020 n° 18-22401).

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